Le dossier médical personnel à nouveau dans l'impasse

Les Echos - 13 février 2007
Emmanuel Grasland

Texte original sur lesechos.fr

Quand l'appel d'offres sur « l'hébergeur de référence » du dossier médical personnel (DMP) va-t-il sortir ? Depuis le mois de décembre et la décision du GIP DMP de lancer un appel d'offres ouvert, la question taraude les industriels qui, de France Télécom à Atos Origin, en passant par Thales ou Bull, se sont positionnés sur ce marché stratégique. Dans le planning présenté à la Commission consultative des marchés des organismes de Sécurité sociale (CCMOSS), la publication de l'appel d'offres était initialement prévue pour le 17 janvier et la notification devait intervenir le 20 avril au plus tôt. Mais, depuis plus de trois semaines, les industriels ne voient rien venir et ils s'en inquiètent. « Compte tenu des délais d'élaboration et de dépouillement des offres, on risque fort de devoir faire un choix entre les deux tours de la présidentielle, estime l'un d'eux. Une décision quasi impossible pour un sujet de société de cette importance. »

Pourquoi ce retard ? Pour la deuxième fois consécutive, l'appel d'offres avait fait l'objet d'un avis défavorable de l'inspecteur général des affaires sociales, Pascal Penaud, lors de la séance du 12 janvier de la CCMOSS. « Nous avons reçu l'avis du second rapport Penaud et nous avons répondu à ses remarques, ce qui a permis à la CCMOSS de rendre un avis qui n'est pas défavorable », indique Jacques Sauret, directeur du groupement d'intérêt public DMP.

Blocage au ministère

En fait, le blocage vient d'ailleurs. Inquiet des deux annulations précédentes de l'appel d'offres, provoquées l'une par un référé de France Télécom, l'autre par un rapport très critique de la CCMOSS (« Les Echos » du 28 décembre 2006), le cabinet du ministre de la Santé, Xavier Bertrand, entend absolument « vérifier que tout ce qui est décrit dans le cahier des charges est en conformité avec l'univers dans lequel va évoluer l'hébergeur de référence ». Dans cette optique, il a demandé fin décembre au GIP DMP de lancer deux missions, dédiées l'une à la validation juridique du cahier des charges et l'autre à « l'évaluation des fonctionnalités du projet du DMP ». Une demande étonnante à ce stade du projet... Avant de publier l'appel d'offres, le cabinet estime aussi nécessaire d'attendre l'avis de la CNIL, prévu pour aujourd'hui, sur l'utilisation du numéro de Sécurité sociale par le DMP ainsi que la validation du projet de décret DMP. Les procédures d'accès au DMP utilisées au sein des établissements de soins suscitent aussi des interrogations, même si, techniquement, ces questions ne concernent pas l'hébergeur de référence mais le portail Internet géré par la Caisse des Dépôts et Consignations.

Dans ce contexte, « les relations sont devenues très tendues entre le GIP DMP et le cabinet », indique un industriel. Des affirmations totalement démenties par les deux parties. Mais, selon un bon connaisseur du dossier, « plus personne n'ose maintenant s'engager sur une date précise pour la publication de l'appel d'offres ».


Le rôle de l'hébergeur de référence
Récemment repoussée au mois de novembre 2007 en lieu et place du 1er juillet, la généralisation du DMP à l'ensemble des bénéficiaires de l'assurance-maladie s'appuie sur le choix d'un « hébergeur de référence » des données médicales. Ce choix va déterminer le coût du dossier médical personnel (DMP), c'est-à-dire le prix étalon payé par l'Etat par dossier et par an. L'hébergeur de référence doit potentiellement pouvoir assurer l'hébergement des DMP pour l'ensemble des bénéficiaires de l'assurance-maladie, avec une montée en charge qui n'est pas connue à ce jour. Il a aussi un rôle de filet de sécurité, en récupérant l'hébergement des dossiers si d'autres opérateurs privés font défaut.