Rapport Gagneux (Mission de relance du projet de Dossier médical personnel)

i-Med - 29 avril 2008
Jean-Jacques Fraslin

« DMP, en route vers l’indéfini et au-delà ! »

Le rapport de la Mission de relance du projet de Dossier médical personnel pilotée par Michel GAGNEUX, inspecteur général des affaires sociales vient d’être remis le 23 avril 2008, à Roselyne BACHELOT-NARQUIN, ministre de la Santé, de la Jeunesse et des Sports.

Texte original sur i-med.fr

Selon un communiqué daté du 23 avril 2008 mis en ligne sur le site du Ministère de la Santé :

« ... Une première version de ce rapport a été remise mercredi 23 avril 2008 au cabinet de la ministre.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative recevra Michel Gagneux et les membres de sa mission mercredi 30 avril pour la remise officielle du rapport et pour échanger sur ses conclusions.
Le Gouvernement, après une analyse approfondie, fera part d’ici la mi-mai des suites qu’il entend donner au rapport afin de relancer le dossier médical personnel dans les meilleures conditions.... »

En teléchargement, une version PDF de 120 pages de ce rapport daté du 11 avril 2008,

Le DMP qui devait être généralisé à l´ensemble de la population au premier juillet 2007 a été le plus grand échec de la réforme de l´assurance maladie de 2004. Un rapport commun de novembre 2007 de l´Inspection générale des affaires sociales, de l´Inspection générale des finances et du Conseil général des technologies de l´information avait conclu que dés le départ précipitation et irréalisme » ont « caractérisé le lancement du projet » en particulier le calendrier d’une mise en place en 2007, « constamment mis en avant pour des raisons essentiellement politiques ». Ce rapport dénonçait « les modalités de lancement de ce projet en font un anti-modèle de gestion publique, le parfait exemple de tout ce qu’il faut faire pour conduire à l’échec d’un projet de portée nationale. »
Rappelons que la Ministre avait ensuite fait constituer un groupe de travail (lettre de mission datée du 10 décembre 2007) en vue de la relance du projet de Dossier médical personnel. Ainsi nommé et encadré, le groupe de travail ne pouvait pas contredire la volonté de Roselyne BACHELOT-NARQUIN, d’autant plus qu’en majorité les membres le composant étaient déjà mouillés dans la piteuse aventure antérieure.

Selon le “Quotidien du Médecin” du 12 juillet 2007 et le “le Figaro”, pour la ministre de la Santé, la « relance » du chantier DMP passait par un changement de nom. Selon Roselyne Bachelot, l’appellation DMP « sonne un peu froid et technocratique ». Un nouveau nom de baptême du DMP restait à trouver. Est ce pour cela que le rapport est titré « POUR UN DOSSIER PATIENT VIRTUEL ET PARTAGÉ ET UNE STRATEGIE NATIONALE DES SYSTÈMES D’INFORMATION DE SANTÉ » ?
L’acronyme D.P.V.P, n’est pas plus sexy que D.M.P. , mais il a l’avantage d’être plus réaliste, « virtuel » voulant aussi dire « qui est à l’état de simple possibilité »...

Les conclusions du rapport sont donc sans surprises. Si on paraphrase Buzz l’éclair, c’est « DMP, en route vers l’indéfini et au-delà !  »

A propos des messageries médicales (Lire discussion sur i-med) , ce rapport confirme la nécessité d’évolution vers des systèmes d’échanges CPS-S/mime compatibles, ce qui n’est pas une nouveauté ni une surprise, mais dans des délais finalement plus courts que ceux que prévoit le décret confidentialité de du 15 mai 2007 (qui subordonne le point de départ du délai à la publication d’arrêtés non publiés).

On note dans le rapport page 42 en bas de page, un moment de lucidité avec une citation de Marie-Catherine Beuscart, du laboratoire EVALAB, qui lors de son audition a rappelé au groupe d’experts, le slogan publicitaire d’une grande firme informatique : « 2/3 des dollars dépensés en technologies de l’information et de la communication en matière de santé le sont pour des projets utilisés moins de 3 mois ou pas utilisés du tout »....

La mission Gagneux se fourre le doigt dans l’oeil en plaçant le WebMédecin (discussion en ligne), à coté du Dossier Pharmacien (DP), sur l’une des premières marches du podium des réussites des systémes d’information de santé. Or au quotidien, cet "historique des remboursements" est pratiquement inutilisable en raison de la lenteur du service et des nombreux messages d’erreur. Quant aux informations en ligne, elles ne sont pas particulièrement riches. Par exemple pour les médicaments on dispose que des seuls médicaments remboursés or ils sont de moins ne moins nombreux. Lire que l’historique des remboursements « commence à évoluer grâce à la technologie des Web services vers une meilleure intégration dans l’environnement des professionnels » est une douce plaisanterie. La seule évolution est l’encapsulation dans le logiciel métier du navigateur. Les uthentifications CPS et Vitale ne sont pas "mutualisées" avec celles du logiciel métier... La carte Vitale est lue par le logiciel metier pour faire la FSE et le sera aussi pour accéder à ce service. Il n’y a pas de dialogue entre les informations de cet historique et le logiciel métier afin par exemple de récupérer les médicaments antérieurement délivrés pour gérer les interactions médicamenteuses....

Charité bien ordonnée commence par soi même...

Une curiosité, page 95 de ce rapport, on peut lire que le chef de la MISS devrait avoir un statut équivalent à celui du chef de l’IGAS.

Rappelons que André Loth, actuel chef de la MISS, est membre du groupe d’experts de la mission de relance du DMP...

C’est sans doute une version moderne de la fable de Miss Grenouille qui voulait se faire plus grosse que le bœuf Igas…

Michel Gagneux résume le pensum dans une lettre, désormais ouverte, à Roselyne BACHELOT-NARQUIN :
« Ce rapport est le résultat d’un travail collégial. Il fait l’objet d’un accord unanime et sans réserve de tous les membres du groupe. Cette unanimité n’est pas anecdotique, dans la mesure où elle exprime une évolution significative des positions institutionnelles vis-à-vis des finalités et des modalités de la conduite du projet DMP. Elle est le gage d’un nouveau climat de confiance et de coopération, indispensable au succès du projet.
Au cours de nos travaux, qui auront été riches en échanges avec les différents acteurs et partenaires du projet, nous avons pu discerner l’émergence d’une forme de consensus sur l’esprit dans lequel nous vous proposons de faire évoluer le projet.
A cet égard, le projet concentre désormais davantage d’espoirs que de réticences. Une prise de conscience collective est en train d’émerger, et la nécessité d’une dynamique du partage de l’information médicale est reconnue par tous, professionnels de santé, patients, industriels. Mais si les attentes sont fortes, tous les doutes ne sont pas dissipés. Nombres d’acteurs ne cachent pas leur crainte de voir le projet subir de nouveaux atermoiements ou coups d’arrêt.
Tous ces acteurs, qui ne demandent qu’à s’engager, plaident pour que les pouvoirs publics annoncent rapidement la nouvelle stratégie, ainsi que les méthodes et les moyens réunis pour la mettre en oeuvre.
Toutes les recommandations que je vous présente au nom du groupe sont empreintes de la préoccupation de vous permettre de relancer le DMP sur des bases consensuelles, réalistes et adaptées à la diversité de ses enjeux stratégiques et opérationnels. Elles forment, j’en ai la conviction, un ensemble cohérent propre à réussir la mise en place progressive de ce nouvel outil et à favoriser l’indispensable modernisation de notre système d’information de santé.
Les systèmes d’information de santé constitueront en effet l’un des leviers les plus puissants de l’amélioration de notre système de soins, dans la mesure où les technologies de l’information offrent désormais des possibilités considérables pour fiabiliser la décision médicale, partager la connaissance et l’expertise, utiliser au mieux les ressources, associer le patient à son parcours de santé.
Tous les membres du groupe vous assurent de leur dévouement et se tiennent à votre disposition pour continuer à contribuer à la réussite du DMP, qu’ils considèrent comme une priorité pour l’avenir de notre système de santé. »