Quia hortulanus esset

Je suis l’ouvrier du silence,
L’au-delà des gestes humains,
L’obole qui contrebalance
L’or des Césars entre vos mains.

Je suis l’innocence de l’aube
Et l’œuf fragile au fond du nid ;
Les replis usés de ma robe
Ont la largeur de l’infini.

Je suis plus vendu qu’un esclave,
Et, plus qu’un pauvre, abandonné ;
Je suis l’eau céleste qui lave
Le sang que pour vous j’ai donné.

Les lys et les agneaux, mes frères,
Sont comme moi sans défenseur ;
Je revêt tous ceux qui pleurèrent
D’une cuirasse de douceur.

Peu m’importe que l’on me nie ;
Je suis l’obscur et l’insulté
Semant sa sueur d’agonie
Aux sillons du futur été.

Je suis la neige qui prépare
La lente éclosion des fleurs ;
Deux bras ouverts, vivante barre,
Diamètre de vos douleurs.

La rose à mes côtés relève
Son visage innocent et beau ;
Le bois mort s’humecte de sève ;
Et la Madeleine au tombeau,

Moite encor des larmes versées,
Reconnaît, dieu qui sanglota,
Le jardinier aux mains percées
Sous l’arbre noir du Golgotha.


Marguerite Yourcenar
1931-1933
Les Charités d’Alcippe

L’expression "quia hortulanus esset" apparaît au chapitre 20 de l’Évangile selon Jean, versets 11 à 18

  1. «  Maria autem stabat ad monumentum foris, plorans. Dum ergo fleret, inclinavit se, et prospexit in monumentum » :
    Marie se tenait près du tombeau, au-dehors, tout en pleurs. Or, tout en pleurant, elle se pencha vers l’intérieur du tombeau
  2. «  et vidit duos angelos in albis sedentes, unum ad caput, et unum ad pedes, ubi positum fuerat corpus Jesu. » :
    et elle voit deux anges, en vêtements blancs, assis là où avait reposé le corps de Jésus, l’un à la tête et l’autre aux pieds.
  3. «  Dicunt ei illi : Mulier, quid ploras ? Dicit eis&nbsp: Quia tulerunt Dominum meum : et nescio ubi posuerunt eum. » :
    Ceux-ci lui disent : « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Elle leur dit : « Parce qu’on a enlevé mon Seigneur, et je ne sais pas où on l’a mis. »
  4. «  Hæc cum dixisset, conversa est retrorsum, et vidit Jesum stantem : et non sciebat quia Jesus est. » :
    Ayant dit cela, elle se retourna, et elle voit Jésus qui se tenait là, mais elle ne savait pas que c’était Jésus.
  5. «  Dicit ei Jesus : Mulier, quid ploras ? quem quæris ? Illa existimans quia hortulanus esset, dicit ei : Domine, si tu sustulisti eum, dicito mihi ubi posuisti eum, et ego eum tollam.“ :
    Jésus lui dit : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » Le prenant pour le jardinier, elle lui dit : « Seigneur, si c’est toi qui l’as emporté, dis-moi où tu l’as mis, et je l’enlèverai. »
  6. «  Dicit ei Jesus : Maria. Conversa illa, dicit ei : Rabboni (quod dicitur Magister). » :
    Jésus lui dit : « Marie ! » Se retournant, elle lui dit en hébreu : « Rabbouni ! » – ce qui veut dire : « Maître ».
  7. «  Dicit ei Jesus : Noli me tangere, nondum enim ascendi ad Patrem meum : vade autem ad fratres meos, et dic eis : Ascendo ad Patrem meum, et Patrem vestrum, Deum meum, et Deum vestrum. » :
    Jésus lui dit : « Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Mais va trouver mes frères et dis-leur : “je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu”. »
  8. «  Venit Maria Magdalene annuntians discipulis : Quia vidi Dominum, et hæc dixit mihi. » :
    Vient Marie de Magdala, qui annonce aux disciples : « J’ai vu le Seigneur et voilà ce qu’il m’a dit. »

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